Cycle de production numérique d’un film d’animation

Etape 1 – Le synopsis

Pour entamer la production d’un film, il faut commencer par rédiger un SYNOPSIS. Il s’agit d’un texte comportant un à trois paragraphes que l’on doit pouvoir parcourir d’un coup d’œil. Le synopsis est le résumé de l’histoire, et ne contient pas d’indications de mise en scène ni techniques précises.

L’auteur du synopsis sélectionne strictement ce qui doit être raconté dans le film, en faisant un inventaire de toutes les scènes, sans rajouter d’intention de réalisation.

Pour transformer cette histoire en film, une vraie mutation s’impose. En effet, une histoire écrite n’est pas du tout de la même nature qu’un film qui est fait principalement d’images et d’actions.

Etape 2 – Le séquencier

C’est pourquoi vient ensuite une phase intermédiaire où intervient le talent du metteur en scène: la phase du TRAITEMENT (ou « SEQUENCIER »), qui est une description détaillée des actions du film. Le synopsis est divisé en séquences et en scènes numérotées, rythmées et organisées pour raconter une histoire. Cette succession numérotée des scènes peut se matérialiser par une phrase résumant chacune d’elles. Le séquencier peut bouleverser la structure narrative du synopsis, sans pour autant trahir l’histoire.

On utilise à cette étape les ressorts dramatiques et les situations de base qui permettent de faire progresser l’histoire : exposition, suspens, action, dénouement, rebondissement, etc…

De là, préfigure le découpage : chaque phrase correspond à une action, donc parfois à un plan. Le séquencier doit être suffisamment détaillé pour donner une idée précise du futur film, compréhensible sans note d’intention.

Etape 3 – Le storyboard

Enfin, le DÉCOUPAGE TECHNIQUE contient toutes les indications techniques (gros plans, plans rapprochés, moyens, lointains, panoramiques, vitesse de restitution du mouvement des objets à l’écran, indications de bande-son, etc…) qui vont être matérialisées par le STORYBOARD.

Le storyboard est bien le document de référence essentiel que tout le monde dans la chaîne de production reconnaît comme tel.

Etape 4 – Les dialogues

L’écriture des dialogues, c’est le plus difficile. Il faut veiller à ce que les dialogues d’une scène ne racontent pas la scène. Eviter de DIRE ce que l’on peut MONTRER. A proscrire aussi les dialogues de fond de cour où les personnages parlent chacun leur tour. Allen ou Capra passent assez mal en film d’animation…

Le dialogue doit donner l’illusion de la vie, il peut être littéraire mais il ne doit pas y avoir de phrasé. Dans tous les dialogues réels, il y a du tacite, du déjà su : un dialogue n’est jamais transparent, un dialogue ne permet jamais une communication parfaite, il renseigne sur le hors champ du personnage.

Etape 5 – L’enregistrement

L’enregistrement des voix est réalisé en studio. Contrairement au doublage traditionnel, les comédiens doivent enregistrer la voix des personnages AVANT la fabrication de l’image.

C’est aussi un avantage : l’enregistrement des voix pour le film d’animation est beaucoup plus créatif que la postsynchronisation. Le comédien est plus libre dans d’interprétation des personnages, il n’a pas de problème de lipping ou de respiration, il peut également ajouter des effets. Mais il faut tout de même respecter ce qui est écrit. Le réalisateur ou le directeur de plateau s’assurent que la vision du film est bien respectée.

Lorsqu’il y a échange entre personnages, il est recommandé d’enregistrer des prises séparées de manière à faciliter le mixage en post-production.

Etape 6 – Le design sonore

La bande-son du film est une donnée fondamentale du film d’animation. Un bon film doit pouvoir pratiquement se suivre les yeux fermés. Le son est une matière, un média qui doit être travaillé en profondeur : musique, effets, bruitages, ambiance sonore, etc.

Que la partition soit abstraite ou réaliste, elle nécessite l’intervention d’un concepteur musical. C’est lui qui, aidé d’un bruiteur traditionnel, réalise l’originalité de la bande son.

Chasseur de son, le bruiteur se rend à l’extérieur pour enregistrer les éléments dans leur milieu naturel. Il peut aussi fabriquer les sons de manière complètement virtuelle en utilisant des logiciel de sampling audio.

Etape 7 – Le graphisme

En amont, le directeur artistique réalise des recherches graphiques pour les personnages, les couleurs, les décors. Des model sheets sont réalisés. Ce sont des planches à dessin, où chaque personnage est représenté dans différentes attitudes et expressions.

A partir du storyboard, pour chaque scène, on détermine le cadre et les limites des dessins. La scène est d’abord divisée en couches (ou « LAYERS »); ces couches seront combinées par transparence par l’ordinateur. Le designer/graphiste dessine sur des couches différentes le décor et les positions d’animation clef pour chaque objet en mouvement.

On applique les règles élémentaires de composition, pour que la scène soit lisible par le spectateur. L’essentiel de l’action doit être visible graphiquement.

Etape 8 – L’animation plan par plan

Pour chaque corps en mouvement, il faut produire une suite de dessins intermédiaires représentant les phases successives de l’action. Le nombre d’images nécessaire est de 24 par seconde. Certains mouvements ne requièrent que 12 ou parfois moins d’images, mais la qualité peut s’en ressentir (Cf. mangas ou films d’animation de bas de gamme).

L’animateur travaille sur des cycles d’animation pour les actions élémentaires comme marcher, courir, nager, etc. Puis sur des animations plus spécifiques pour chaque mouvement précis selon les exigences de l’action du personnage, ou en cas d’interaction avec le décor.

S’il est évident qu’un personnage a des caractéristiques d’abord exprimées dans le scénario, c’est bien l’animation qui le rendra attachant, détestable, comique ou séduisant.

La réutilisation de l’animation est indispensable. Les poses du corps, avec différentes attitudes principales, vont être employées à plusieurs reprises dans des combinaisons multiples. Par exemple, différents bras peuvent être utilisés sur le même corps, de même que les bouches et les yeux sans avoir besoin de refaire le corps entier pour chaque mouvement. Le niveau de qualité de l’animation souhaité défini le taux de réutilisation dans le film.

Que ce soit en animation 3D, vectorielle ou traditionnelle, le travail d’animation ne peut être effectué que par des artistes très qualifiés.

Il existe plusieurs techniques permettant de faciliter ce travail, mais aucune ne réussissent à l’automatiser. Voir par exemple Pigmentz et Esquisse.

Etape 9 – Le montage

Le montage final est effectué sous la responsabilité artistique du réalisateur et du monteur, à l’aide d’un outil de compositing.

Même s’il suit scrupuleusement le storyboard, c’est le monteur qui crée le rythme général du film au final. En ce sens, son travail peut l’amener à raccourcir ou supprimer un plan, ou modifier l’enchaînement des séquences pour améliorer la lisibilité et le tempo du film.

Il existe un grand nombre d’outils de montage virtuel adaptés à l’animation vectorielle ou traditionnelle. En voici une liste non exhaustive :

Etape 10 – L’exportation vectorielle

Il faut ensuite exporter l’épisode au format SWF (Adobe Shockwave Flash), pour permettre son transport sur le web et sa lecture sur ordinateur. Lors de l’exportation il faut régler les paramètres de compression des images et du son en tenant compte de l’objectif de qualité et du poids total du fichier. Cette étape est sous la responsabilité du chargé de production.

Pour parvenir à diminuer le poids du fichier SWF, on peut jouer sur plusieurs paramètres :

  • Si le film comporte des images bitmap, il est possible de diminuer la taille de visualisation du film et le taux de compression des images. Le processus de compression est destructeur pour l’image : plus on compresse l’image bitmap, plus on la simplifie, plus on la dégrade.
  • Il est possible de compresser le son, en diminuant les pistes audio (stereo en mono) ou en utilisant un algorithme de compression performant comme le MP3. Encore une fois, ce processus de compression est destructeur pour le son.

Si le film ne comporte que des images vectorielles, la diminution de la taille de visualisation du film n’aura aucun effet sur le poids de ce dernier. Plus important, le poids d’un fichier SWF dépend étroitement de la méthode avec laquelle les symboles ont été utilisés dans le film.

Pour la diffusion sur le web, il est recommandé de rajouter une séquence de téléchargement. La séquence de téléchargement est une courte boucle d’animation qui permet de renseigner l’utilisateur sur la progression du téléchargement du fichier sur sa machine sous forme de barre de progression, du temps qui lui reste à patienter ou du volume de données restant à télécharger.

Etape 11 – L’exportation vidéo

L’exportation vidéo consiste à enregistrer le film définitif sur un support analogique (ou numérique) en vue de sa diffusion sur un réseau hertzien.

Pour cela, il est nécessaire de respecter les standards de diffusion pour tout ce qui concerne : la cadence des images, le nombre de trames, la taille de l’image, l’échantillonnage. Chaque standard analogique possède des normes différentes (NTSC, PAL, SECAM).

La norme internationale de vidéo numérique est la CCIR 601 (MPEG-2) : traitement YUV 4:2:2 et image de 720×576 pixels. Il est bien sûr recommandé de travailler en vidéo numérique. Dans ce cas, se pose le problème de la compression vidéo. En effet le volume d’information (image et son) ne peut être enregistré tel quel ; il faut simplifier le contenu pour réduire considérablement le poids du fichier. Le processus de compression est destructeur pour l’image et le son, mais heureusement reste invisible à l’œil nu pour peu que l’on utilise un algorithme de compression performant. Il est d’usage de sous-traiter cette étape dans un labo vidéo professionnel.

Enfin, pour la diffusion hertzienne, la mise aux normes P.A.D. est indispensable : mise en conformité, insertion d’un panneau identificateur et d’un décompte. La mise aux normes dépend de la chaîne de télé.

Publié en 2001